#6 - C'est parti ! La gauche a son duel
Cette fois, c’est parti.
Jusqu’ici, à gauche, tout était trop flou - ou gazeux, comme certains se plaisent à dire. Face à cette armée de potentiels candidats, dont quasiment aucun de déclaré à presque un an de l’échéance, personne n’y voyait clair.
Le début d’année a vu la grande machine de la présidentielle se mettre en branle. Il faut dire qu’au sein du milieu politico-médiatique, beaucoup n’attendaient qu’une chose : l’installation d’un combat, et si possible, d’un duel.
C’est viscéral : tout le monde attend le duel, quitte, parfois, à tordre un peu les choses pour qu’il devienne réalité. Cette fois-ci, le besoin ne s’est même pas fait sentir.
Car entre Hidalgo et Montebourg - les deux noms qui ressortent désormais du lot à gauche (au-delà de Mélenchon, qui reste toujours aussi rejeté au-delà de LFI) -, il n’est pas besoin de forcer le trait pour constater les différences.
Entre la femme sociale-écologiste qui a mis à terre la Macronie façon Teddy Riner, et l’homme entrepreneur qui avait claqué la porte du gouvernement Hollande-Valls, chacun cultive sa singularité. Nous avons là deux profils, deux électorats, deux lignes, bientôt deux camps, que tout distingue. Deux méthodes, aussi : alors qu’Hidalgo cherche d’abord à apparaître comme le nom le plus crédible à gauche - quitte à froisser les Verts sur les questions qui fâchent, où elle sait qu’elle est en position de force dans l’opinion -, Montebourg n’hésite pas à labourer d’emblée sur les terres de droite (islamisme, nucléaire, critique de la “gauche sociétale”), pour les raisons présentées précédemment.
Avec le duel Hidalgo - Montebourg, la bataille peut maintenant commencer. Chacun va tracer sa route jusqu’au second semestre, où tout se cristallisera - avec les sondages en juges de paix.
Reste un paradoxe : en réalité, malgré les articles publiés ici et là, aucun des deux n’est pour le moment totalement déterminé à se présenter. Certes, les deux mouillent un peu plus que le doigt de pied - à l’inverse de Taubira, qui, à force de rester en surplomb, se condamne à rester un fantasme - mais aucun n’est encore prêt à se jeter à l’eau. Aussi bien Hidalgo que Montebourg attendent le début d’une dynamique, d’un souffle, pour se lancer véritablement dans la bataille.
Evidemment, aucun n’entend rester passif d’ici là. La fameuse dynamique, pierre philosophale de tout candidat à la présidentielle, se provoque. Là aussi, chacun suit sa propre méthode. Hidalgo laisse faire ses proches, nombreux à se presser autour d’elle pour la pousser ; la ruche Hidalgo ne cesse de bourdonner autour de la reine mère qui laisse dire et approuve du regard les initiatives. Montebourg, plus isolé, est contraint d’aller lui-même au charbon ; interviews dans les médias, passage dans Thinkerview, propos chocs…Il fait le maximum, puis jugera en fonction de l’intérêt provoqué…ou non. Le verbe haut, Montebourg n’en reste pas moins un homme qui doute ; en son for intérieur, comme il le confie en privé, il n’est pas persuadé, à l’inverse de Macron, Hollande et Sarkozy en leur temps, d’avoir nécessairement un destin présidentiel - ce qui lui fait, là-dessus, un point commun avec Hidalgo.
Autrement dit : non seulement le duel annoncé n’a rien de certain, mais il se pourrait même qu’aucun des deux, au moment décisif, ne choisisse la voie de l’audace. Or l’audace sera un prérequis pour se lancer, à l’heure où la gauche, même “augmentée” de quelques points récupérés ailleurs, reste fragile dans l’opinion. Dès lors, nul ne devrait écarter l’hypothèse, bien qu’aujourd’hui improbable, de l’émergence d’une troisième figure, restée en seconde ligne tout au long de 2021 et qui surgirait par surprise dans la dernière ligne droite, façon Fillon face au duel Juppé - Sarkozy…
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